“Aux oubliettes nos cartes de profs, on sort nos cartes de presse ! Et même : nos cartes de rédac’ chef(fe!)… Pour accueillir pour la première fois les 5eMédia.
Une semaine sur deux nous les recevons devant la lourde porte du CDI du collège, si lourde que certains ne l’avaient jamais poussée. Ils entrent, en rang, dans un émouvant silence rompu par le seul battement de leurs paupières sous l’effet de l’ébahissement devant tant de belles choses à expérimenter.
Ceux-ci constituent des groupes qui varient tout au long de l’année, les affinités footballistiques ou télévisées l’emportant au début sur le choix d’une ligne éditoriale. De séance en séance, ils décomposent la « une » des quotidiens régionaux et nationaux, découvrent l’étrangeté du vocabulaire de la presse (le ventre, les oreilles, les colonnes, les marronniers, les chiens écrasés…), vérifient les sources avec esprit critique, rédigent leurs propres articles en tenant compte du moindre conseil de leur enseignant de français, illustrent leurs textes et les titrent, relisent, rerelisent, rererere, parfois laissent passer une voire deux fautes d’orthographe (disons des coquilles), procèdent aux vérifications, respectent le droit d’auteur, etc. Et sont fiers d’eux !
Ce faisant, nos jeunes journalistes réfléchissent à la liberté d’expression, à la déontologie du métier, aux éventuelles dérives propagandistes, au droit d’image ; ils s’offusquent de la misogynie dans bien des articles sur le sport ; ils se montrent méfiants vis-à-vis des théories du complot, des fakenews, des informations pas recoupées, de ce qui circule sur les réseaux sociaux…
Sur le terrain saint-charlois, arborant fièrement leurs propres cartes de presse joliment plastifiées, ils gèrent avec appréhension leurs prises de rendez-vous avec les salariés de l’OGEC (le cuisinier, l’intendant, l’infirmière, la secrétaire, le CPE du lycée, le big boss…), préparent des interviews, notent les réponses des personnes interrogées (qui méritent nos remerciements ; donc : merci !), ensuite les citent entre guillemets ou bien reformulent avec probité…
En complément du cours d’éducation morale et civique (trop peu rémunéré selon tous les éminents experts) et d’histoire (encore pire d’après nos sources et nos ressources !), les jeunes apprennent que l’arme des journalistes est un stylo ou un ordinateur, ce qui peut paraître dérisoire face à des armes de guerre… et pourtant leurs stylos bien chargés effraient les tyrans, les extrémistes, les censeurs, les tricheurs !
En somme, en jouant ces rôles de journalistes (le « 4epouvoir » dirions-nous au pied des palais), ils jouent déjà un autre rôle : celui de CITOYEN.”
Carine AKPAH & Christophe AUBERTHIER, juin 2019
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